La Mode 1515 1535

Extrait du  Journal du Bourgeois de Paris  1515-1536

Description de la Mode qui Court

La mode, en sa parfaicte essence,

Est des filles de l’inconstance,

Sœur germaine du Temple qui court,

Et grande dame de la court ;

Brusque, bizarre et vagabonde,

En France plus qu’en lieu du monde,

Tousjours grosse d’inventions

Qui n’ont qu’un temps et puis s’en vont,

Selon que leur mére volage

Reigle et gouverne leur voyage.

Au poil des hommes seulement,

Sont cent sortes de changement.

Chacun aujourd’hui sévertue

A fair sa barbe pointue ;

Et n’y a point plus de six mois,

Qu’on la portoit de quatre doigts,

Grande, large, et ronde à merveille,

Jusques audessous de l’oreille.

Les chapeaux  ronds de mil six cent

Ne régnent plus, mais maintenant

On court de boutique en boutique,

Pour en chercher à la Ronique. (a)

Cinq et six ans expirés sont,

Qu’on ne portoit rien que boutons,

Milliers d’escailles et coquilles,

A la façon des crocodilles.

Les casaquins (b) des laboureurs

Ont couru entre les veneurs,

Et desja ces pauvres casaques

Ne servent plus que pour les masques.

Le Buffetin (c)a eu son cours

Plus que ni damas ni velours :

De present, on tient quelque mode

Du temps de Tibère et d’Hérode ;

Car manteaux doubles et cabans

Estoient fort communs aux tyrans

Et aux archers de Palestine.

Les robes de la Medecine,

Entre la gent des Philistins

Servaient aux sorciers et devins  

Et mesme estoient fort en vogue,

                Au milieu de la Synagognue. …            

a : à la mode de la Reine où du Roi.

b : Vêtement ; Sorte de déshabillé court, que l’on porte pour la commodité :Un  plus courte que la casaque, il paraît sous le règne de Henry II et sert, comme elle de surtout pour le costume civil et le costume militaire. Casaque : Espèce de paletot sans ceinture tombant au genou, à courtes et larges manches refendues et laissant l’avant bras à découvert. La coupe de ce vêtement comporte sur les cotés des fentes nouées comme celles de la dalmatique ou du tabart des hérauts d’armes au XVe siècle.

C : Buffetin, vêtement de voiturier : vêtement de peau.

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Je le tiens pour un sçavant maistre,

Bien qu’on l’estime sot benest.

Il est sçavant, on s’il ne l’est,

A tout le moins, il le pense estre.

Parfois ses vers ont leur mesure,

Et par fois ils ne valent rien :

Car, estant docte à l’avanture,

Cest avanture s’il fait bien. 

Extrait du  Journal du Bourgeois de Paris  1515-1536 Description de la mode qui court

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